Dimanche mars 2014Observation au paddock Le temps était encore couvert en cette fin de mois, mais il ne faisait pas froid. Malgré la menace de pluie, je décidais quant même d’emmener Gnap au pré au lendemain de notre première séance montée. D'ailleurs, c'est en fait aux paddocks que je me dirigeais, car le pur-sang étant obèse, il lui était interdit de prendre du bon temps dans le pâturage. Pauvre bête, je pouvais comprendre sa peine ! Mais c'était pour son bien. Il me suivait d'un pas lourd au bout de la longe, car il savait pertinemment qu'on ne passerait même pas à côté de la moindre touffe d'herbe, alors à quoi bon ? Je dois le tirer un peu pour le motiver. J'ouvre la barrière, referme derrière nous et une fois au milieu, lui retire le licol avant de m'éloigner.
J'avais toute ma journée pour moi, et à vrai dire je l'avais mené au paddock avec une idée bien précise derrière la tête : il fallait que je le vois fonctionner, que je trouve une faille, une solution, l'indice qui me permettrait de le comprendre et donc, le faire avancer sous la selle. Mais à première vu, c'était un cas désespéré : il était resté planté comme un poteau là où je l'avais laissé et me regardait avec un air béat. Nous nous sommes fixés comme ça plusieurs secondes. Qu'est-ce qu'il voulait ? Qu'est-ce qu'il attendait comme ça pour en profiter et marcher ? J'avais l'impression d'être dans un film, un moment intense entre lui et moi... Ou dans un sketch, ça marche aussi, parce qu'on avait un peu l'air de deux débiles qui se regardent dans le blanc des yeux.
- Aller, file ! Aller, vas-y qu'est-ce que tu attends ? Bouge !
J'agitais les bras en lui faisant signe de s'éloigner, comme si il pouvait comprendre. Il leva un peu la tête pour mieux voir ce que je faisais, et marcha lentement dans ma direction. Septique, j'attendais de voir ce qu'il allait faire... Le bai continuait, balançant son encolure lourdement, jusqu'à s'arrêter droit, juste devant moi, pour me regarder. Bon ok... Aucun intérêt pour l'environnement, aucune utilisation de l'espace mais une proximité avec l'homme. Besoin de présence ou pure réponse à ma voix, même si je l'appelais pas vraiment ? Je lui caressais le chanfrein en soupirant, dépité. Même au pré, il ne semblait pas avoir envie de s'activer. Plusieurs minute de silence s'écoulèrent, moi toujours accouder à la barrière, Gnap en train de s'assoupir... C'est au moment où j'étais le plus concentré dans mes pensées qu'il décida de se mettre en route. Peut-être qu'un bruit lointain l'avait réveillé ?
Quoi qu'il en soit, il marchait enfin, lent et tête basse, mais au moins il ne faisait pas son playmobil. Il reniflait le sol avec beaucoup d'attention, cherchant le meilleur endroit pour se rouler ; selon lui le mètre de carré d'herbe rase la plus courte et la plus sèche. Il ressemblait à un gros flanc qu'on aurait fait échapper du pot du haut d'une table. Même en se roulant, rien n'était fait avec entrain. Il dut même s'y prendre a deux fois pour se relever, tellement ce flemmard voulait économiser son énergie. J'hésitais entre le pathétisme et la compassion, pauvre cheval quant même... Une fois debout, il se remis a marcher, pour faire un tour de paddock, avant de s’arrêter pour faire son crottin et reprendre la sieste là où il l'avait laissé. Je décidais de rentrer au club house un moment, pour le récupérer dans une heure, il fallait que je réfléchisse... Ce "faux cheval" était décidément très déconcertant...
[Voulait finir mieux mais pas le courage ce soir !]